Claire, maman de Valentin et Iris

Claire a pris le temps de nous parler de son histoire de maman : après avoir traversé un deuil périnatal à 17 ans et d'importants problèmes de santé, cette maman a vécu une deuxième grossesse très surveillée. Elle nous partage son expérience de maternité, son parcours en MAP (Menace d'accouchement prématuré) jusqu'à l'arrivée de sa petite Iris.

Claire a su retrouver la joie de la maternité après un deuil périnatal

Claire, présentez-vous en quelques mots :

Je m’appelle Claire, j’ai 26 ans. Je suis devenue maman pour la première fois en 2011, mais hélas une maman un peu particulière. Mon petit garçon Valentin, est décédé après deux heures de vie, à la suite d’un accouchement prématuré (à 25 SA). J’ai à mes côtés depuis 7 ans et demi, un homme extraordinaire et bienveillant, Alexandre. Nous sommes les heureux parents de Iris, une petite fille en parfaite santé, née en 2018. C’est l’arc en ciel de ma vie. (Instagram)

Quel a été votre parcours vers la parentalité ?

Il a certaines choses que nous ne sommes pas en mesure d’expliquer. J’ai toujours été attirée par la maternité et je savais intimement que cela serait un facteur d’épanouissement pour moi. Alors quand j’ai découvert ma première grossesse, malgré mon jeune âge, il était inconcevable que je m’en sépare. J’ai vécu ce qu’on appelle communément une « grossesse parfaite », ou en tout cas une grossesse pleine d’innocence et de naïveté. Jusqu’à ce jour où tout s’est précipité… La douleur, l’incompréhension, l’ambulance, l’hôpital, et ces mots tranchants : « vous allez accoucher, votre bébé ne va pas survivre », « vous accouchez une semaine trop tôt » (à l’époque, l’hôpital dans lequel j’ai accouché ne prenait en charge aucun bébé avant 26 SA), « on ne sait pas ce qu’il s’est passé, ça arrive une fois sur 1000 et c’est tombé sur vous »… J’ai hurlé, comme jamais je n’ai pu crier auparavant, transpercée par une douleur incommensurable à la fois physique et psychique. Et puis j’ai accueilli mon fils, à la fois si beau et si frêle, d’une fragilité déconcertante. J’ai profité de mon mieux de cette bulle hors du temps, avant qu’il ne s’éteigne à jamais, au creux de mes bras et contre mon cœur.

Comment se remet-on d’une telle épreuve (à 17 ans) ? Comment surmonter un deuil périnatal ?

Il n’y a pas de réponse à cela. Chacun fait comme il le peut pour ne pas sombrer … naviguant entre le désespoir, la colère, la culpabilité ; comme balancé au gré des flots contre de nouveaux rochers, chacun aussi dur à franchir que le précédent. Le parcours fut, pour moi, complexe et semé d’embûches. Deux longs séjours en hôpital psychiatrique, des traitements psychotropes (pendant 6 ans au total) et puis - deux ans et demi après la perte de mon fils - l’apparition d’une maladie rare et méconnue : l’hypersomnie idiopathique (accompagnée de son lot de symptômes, de traitements médicamenteux lourds et de retentissements sur la vie personnelle et professionnelle). Un peu plus tôt, on m’avait également diagnostiqué une maladie neurologique qui est le tremblement essentiel. Pour couronner le tout, mon métabolisme « s’est mis à l’arrêt », là encore de façon inexpliquée, me faisant prendre 35 kg en 10 mois.

En parallèle je me suis battue contre moi-même, et contre tous ces maux qui me ruinaient la vie, pour poursuivre mes études tant bien que mal. Et j’ai commencé à cheminer petit à petit … vers l’apaisement. Les groupes de parole organisés par l’association Naître & Vivre m’ont été d’un très grand réconfort. Ces temps d’échange avec d’autres parents étaient extrêmement enrichissants et précieux. J’ai bien évidemment poursuivi ma psychothérapie et je me suis même tournée vers quelques médecines alternatives. Véritable soutien indéfectible, mon compagnon m’a aidée à traverser nombre de ces épreuves, puisque les premiers signes de la maladie ont fait leur apparition seulement quelques mois après notre rencontre ... Je lui dois beaucoup, beaucoup. Mais alors que les effets bénéfiques de mon traitement s’amenuisaient, que tout devenait de plus en plus compliqué à gérer et que j’atteignais vraisemblablement mes limites - tant au niveau de mes études que de ma vie personnelle – une jolie surprise est arrivée. La « grossesse d’après », quelle belle et terrifiante aventure.

Je savais pertinemment que cette grossesse serait stressante compte-tenu de mon parcours. Ce fut encore plus que ça : un vrai combat. Fort heureusement, j’ai été accompagnée tout le long par une gynécologue obstétricienne incroyable ! Le premier trimestre fut éprouvant physiquement (fatigue, nausées et vomissements à gogo, contrairement à ma première grossesse) et émotionnellement (suspicion d’une fausse-couche et en fait non, annonce de la nouvelle à toute la famille). A 3 mois de grossesse à peine, j’ai été contrainte de m’arrêter et de cesser le plus possible tout déplacement. A 4 mois, on commençait à craindre un problème, mais pas encore de signes précis … C’est entre 23 SA et 24 SA, qu’on a compris. Mon col s’ouvrait déjà, doucement, sous le poids de mon bébé qui grandissait. « Incompétence cervicale » : le diagnostic est tombé et il m’a libérée quelque peu, en m’apportant la preuve que je n’étais pas responsable du décès de mon fils, et que ce n’était pas non plus « un mauvais coup du sort ».

Concrètement je passais donc en MAP (Menace d’Accouchement Prématuré) et le combat a alors débuté, à même pas 5 mois de grossesse. Les contractions sont apparues au même moment, et ne m’ont pas quittée, jusqu’à la fin. J’ai d’abord été hospitalisée deux semaines pour me permettre de vivre plus facilement ce cap - psychologiquement difficile - des 25 SA. Puis, j’ai pu rentrer en Hospitalisation à Domicile avec un suivi médical adapté, plusieurs monitorings par semaine, des échographies très régulières … J’ai finalement été ré-hospitalisée plusieurs fois, dont une fois transférée en urgence à l’hôpital de Niveau 3 car j’ai clairement failli accoucher à 32 SA, la péridurale était posée … Et en fait non, ma fille s’est accrochée !

Au total, j’ai passé trois longs mois en alitement strict : sans me lever, à part pour aller aux toilettes ou me doucher. Les journées étaient rythmées par les contrôles médicaux ou les contacts avec mes proches. C’était dur, extrêmement éprouvant, mais je m’y tenais et je ne me laissais pas le choix : je connais trop bien les conséquences possibles de la prématurité. On avançait petit à petit, en cochant les semaines sur l’agenda et en soufflant à chaque nouveau cap franchi. A 34 SA j’étais tellement soulagée et heureuse d’en être arrivée là… Je me souviens avoir bu du Champomy avec mon cher et tendre et mes parents, sur la terrasse de la Clinique. A 36 SA, la prématurité était enfin derrière nous, j’étais désormais en « pré-terme » et je pouvais commencer à remarcher.

Notre petite Iris a tenu bon jusqu’à 37 SA + 6 jours … Un accouchement en siège, magique et très rapide (forcément quand on a déjà plus de col !) qui m’a permis de me réconcilier avec la maternité, mais aussi avec mon histoire. Sans la disparition tragique de mon fils, le corps médical n’aurait pas été sur ses gardes, rien n’aurait laissé présager le moindre problème, et je n’aurais très certainement pas pu sauver ma fille. J’aime à croire qu’il a, en quelque sorte, veillé sur elle et cela donne un sens à l’impensable. Les mois ont passé et ma maladie – dont les symptômes s’étaient fait oublier pendant toute la durée de la grossesse – n’est pas revenue. Les médecins ne l’expliquent pas. C’est mon petit miracle à moi. Mes kilos se sont envolés par la même occasion. J’ai repris mes études. Et je chemine toujours davantage … vers l’apaisement.

Le conseil qui vous a été le plus utile pendant votre grossesse et les premiers mois du bébé :

Cette citation merveilleuse de ma sage-femme, qu’elle m’a écrite sur un post-it pour la relire à chaque fois que j’en aurais besoin, quelques semaines après la naissance de ma fille. Ça a fonctionné puisque je la connais par cœur et, qu’aujourd’hui encore, je me la remémore régulièrement : « Je fais de mon mieux, Dans le respect de moi-même, Avec les cartes de l’instant, Le reste appartient à la vie ».

Votre jolie anecdote avec le corps médical :

Pour ma deuxième grossesse, j’ai eu la chance d’être remarquablement bien suivie. Au fil de mes hospitalisations, j’ai pratiquement rencontré la totalité des sages-femmes et des gynécologues obstétriciens de la Clinique. Cela a créé un climat rassurant autour de moi. Si je devais citer les deux moments qui m’ont le plus touchée :

- Avant mon transfert en Hôpital de niveau 3 (car on pensait que j’allais accoucher à 32SA), la gynécologue est venue me voir sur mon brancard pour me dire de ne pas m’inquiéter, qu’ils prendraient de mes nouvelles et qu’ils feraient tout leur possible pour « me récupérer » au plus vite avec mon bébé dans leur unité kangourou (finalement, je n’ai pas accouché et je suis revenue au sein de la Clinique moins de deux semaines plus tard).

- Quand j’ai atteint 34 SA, c’était une nouvelle victoire sur la prématurité mais aussi la certitude que j’accoucherai bien dans la Clinique où j’étais hospitalisée et que mon bébé pourrait être pris en charge. Ce matin-là, la sage-femme est venue accrocher une petite feuille dans ma chambre, elle y avait inscrit « 34 SA » avec un sourire et un soleil … Ça parait anodin comme ça, mais l’équipe soignante savait ce que cela représentait et cette petite attention m’a fait chaud au cœur ! 

Ce qu'on ne vous avait pas dit et que vous auriez préféré savoir : 

Pour ma part, j’ai tellement vécu ma grossesse au jour le jour, focalisée sur la santé de ma fille, que je n’avais pas imaginé à quel point je serai encore inquiète même après sa naissance. Jusqu’à ses quatre ou cinq mois, je craignais énormément la mort inattendue du nourrisson. Je retournais voir si elle respirait, je me réveillais en sursaut la nuit pour écouter ses bruits, j’en faisais parfois des cauchemars … Je sais désormais que tous les parents (même ceux qui ne sont pas passé par un deuil périnatal) ont parfois ce genre de craintes. Cela m’aurait aidé de le savoir avant, car je culpabilisais beaucoup et j’avais peur de transmettre mes angoisses à mon bébé. Heureusement, cela s’est apaisé par la suite, au fur et à mesure que ma fille grandissait.

Votre découverte produit fétiche pour vous ou votre bébé : 

Honnêtement, nous avons plutôt utilisé des choses classiques pour notre fille mais si je devais citer un produit qui nous facilite la vie au quotidien, c’est une tasse d’apprentissage fermée par une ventouse. Clin d’œil à ma belle-sœur qui nous avait offert une Miracle 360° cup de Muchkin, à la suite de quoi je me suis empressée d’en acheter deux autres supplémentaires. C’est génial, bébé peut apprendre à boire tout seul très tôt (et sans en mettre partout), et quand ça tombe par terre pas de catastrophe ! Quant à moi, je ne peux plus me séparer de mon coussin de maternité Doomoo. Il soulage mon dos et mes genoux ; je serais désormais incapable de trouver le sommeil sans lui ! 

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