Parce qu’il ne faut pas confondre baby blues et difficultés voire épuisement maternel, il est important que les langues se délient, que les expériences se partagent, et que des aides pertinentes se mettent en place. C’est ce qu’a fait, avec beaucoup de talent, Hélène Bonhomme, après un burn out maternel qu’elle n’avait pas vu s’installer, mais qu'elle a pu surmonter.
Cette jeune maman de jumeaux a un jour pris conscience de son épuisement et de la nécessité de changer ; elle n’était pas la mère qu’elle s’imaginait être et passait des cris aux pleurs chaque jour durant son congé parental.
Depuis, elle a fait un beau chemin, et deux autres enfants. Elle raconte dans un livre son expérience, qu’elle met au service d’autres mères dans Le Village.
Comment on tombe dans le burn out maternel ?
On ne le voit pas venir, confie Hélène. Pourtant, un jour, force est de constater que la maternité n’est pas le cadeau que l’on imaginait, c’est même un fardeau.
« Aidée par la culture ambiante de la réussite parentale, je m’étais construit l’image mentale d’une vie de famille qui irait de soi. » écrit-elle dans son livre.
Subir sa maternité, ses enfants est source d’une culpabilité et d’une honte sans borne, qui décuple alors le phénomène d’épuisement et d’isolement.
Hélène a brisé le tabou pour sortir de cette épreuve ; elle en parle dans son livre mais également dans l’émission « 1001 vies » avec Frédéric Lopez.
A travers son récit, Hélène évoque beaucoup de pleurs, de cris, mais aussi l’insupportable (et pourtant banal) recommencement du quotidien : courses, nettoyage, changes, lessives. La jeune mère de jumeaux réalise alors qu’elle n’a pas la vie et la maternité dont elle avait rêvé, elle n’en profite pas et la subit… elle n’est pas la mère qu’elle pensait être.
Le déclic et la prise de conscience du burn out
Elle a un déclic un jour comme les autres de son congé parental, ses jumeaux ont deux ans. Elle décroche le téléphone pour quelques minutes et s’isole pour échanger au calme. À son retour dans la pièce, les 24 oeufs achetés le matin même ont été sortis du frigo par des petites mains malicieuses … qui ont joué au ping pong avec !
Ce qui fait basculer Hélène ce n'est pas la bêtise en elle-même mais c’est le fait que ces enfants rient… alors qu’elle n’a qu’une seule envie pleurer, crier. Ce qu'elle fait, avec une intensité nouvelle qui lui fait peur, autant qu’à ses enfants.
Elle réalise alors qu’elle ne peut plus être cette mère-là. Elle doit changer. Pour eux autant que pour elle.
L’épuisement de la mère parfaite : n’être jamais assez
La maternité est une tempête sur l’estime de soi explique Hélène, et pourtant, on n’est jamais assez. C’est parce que l’on voudrait être parfaite en tout point. Personne ne l’est, et ce n’est certainement pas quand un tsunami de couches et de nuits hachées nous submerge que nous allons le devenir !
La maternité est une série de micro-traumatismes, un stress répété pendant des mois, des années, une hyper vigilance permanente… Ce sont souvent des problèmes mineurs à l’échelle de la vie, pour lesquels on n’osera pas se plaindre, mais qui répétés, et à bas bruit, deviennent des traumatismes du corps et de l’esprit.
Elle aurait aimé entendre « moi aussi j’ai du mal … » pourtant personne autour d’elle ne le dit, ce qui renforce son idée d’être la mère parfaite et de ne rien laisser paraitre. Elle évoque avec malice les histoires de vie de contes de fées qu’on nous « vend » : on lit « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants » mais rien ne dit comment ça se passe après, avec ces enfants, pour Cendrillon, Blanche Neige et les autres ! Que se passe-t-il dans le foyer pour toutes ces mères ?
Quand ça ne va pas, on pense qu’on est seules et que c’est chez nous que quelque chose cloche. C’est ce qu’a longtemps cru Hélène.
« Je me suis rendue complice d’une imposture généralisée qui laisse penser à chaque maman lessivée qu’elle est la seule à boire la tasse. »
On aurait besoin d’aide dans ces moments là, mais on n’en veut pas tellement car on espère être parfaite. Alors qu’on est à la recherche d'un résultat (des enfants propres, sages, une maison rangée…) plus que d’un bien-être intérieur, on se trompe d’objectif et on ne sait pas se faire aider. Un sentiment paradoxal avec le sentiment de solitude que ressentent les mères en épuisement.
Les symptômes de l’épuisement
Hélène raconte qu’elle n’a pas vu arriver son burn out, pourtant elle vivait des journées intenses, comme de nombreuses mères. Elle qui aurait pu s’endormir au milieu d’une armée de Playmobils, n’a pas questionné son état avant les deux ans de ses jumeaux.
Elle parle de l’attention permanente portée à ses enfants, et elle ajoute que son truc à elle c’était de regarder en permanence l’heure… attendant le moment de la sieste pour se retrouver « sans eux », se « débarrasser d’eux ». Elle se trouve indigne bien sûr de penser ça, et cette honte démultiplie l’émotion et donc l’épuisement mental.
Tout ça est un processus faussement banal comme le dit justement le journaliste Frédéric Lopez lorsqu’il interviewe Hélène pour l’émission « 1001 vies ».
Le rocher de Sysiphe : l’éternel recommencement des tâches et la perte de sens
Pourtant derrière tant de « banalité », l’épuisement ressentie par les mères amène des pensées et des émotions exceptionnelles. Le burn out parental peut être ressenti comme une perte de sens dans sa parentalité.
Quel sens donner à une répétition épuisante de tâches et de difficultés que l’on n’ose même pas exprimer ?
Comme d’autres mères, Hélène reconnait le goût d’inachevé, la frustration de ne jamais atteindre l’agréable sentiment du travail accompli, et le manque cruel de reconnaissance dans son rôle de mère.
En outre, c’est un aveu de faiblesse de dire qu’on n’y arrive pas ; c’est aussi dire que l’on n’a pas « réussi ». Impossible pour beaucoup de femme, et pour Hélène c’est un aveu d’échec.
La distanciation
Le quotidien de la jeune mère est tellement épuisant qu’elle préfère alors ne plus rien ressentir. Un mécanisme classique qui permet d’éviter de souffrir. S’installe alors, ponctuellement, une distanciation avec les événements : un enfant se fait mal, on pense, et on dit « tan pis pour toi, ça t’apprendra » au lieu de le réconforter…
La mère irritable, stressée, peut alors devenir insensible et distante. Une posture de survie, de protection, pour celle qui ne peut plus se permettre d’accueillir trop d’émotions fortes.
Comment aimer alors la personne que l’on est et ce que l’on accompli ? Hélène insiste sur cette dimension de son burn out maternel : elle n’aime plus qui elle est, ce qu’elle fait. Elle ne se reconnait pas et se déteste. Impossible d’être une bonne mère dans ces conditions.
Victime ou bourreau ?
Hélène confie aussi que dans ces moments de souffrance, elle avait bien sûr envie d’être considérée comme une victime, il lui fallait donc un bourreau (ou plusieurs) : les enfants. Mais elle admet aujourd’hui qu’elle n’était victime que d’elle-même, de son propre comportement envers elle-même, de ses exigences de perfections.
VOIR L’ÉMISSION « 1001 vies »
« A vouloir exister en étant parfaite on en vient à accepter des choses inacceptables, explique Hélène dans l’émission. Je me laissais manger, mais ce n’était pas la faute des autres, c’était moi de changer. »
Comment sortir de l’épuisement maternel ?
La maternité est une révolution, un tsunami… en tout cas une des grandes vagues de notre vie : elle secoue et brasse tout sur son passage, elle peut nous renverser, autant que nous emporter loin : « si tu attends une vague de face, elle va te renverser à coup sûr. Par contre, si tu plonges dedans, alors elle ne pourra rien contre toi ; au contraire, c’est toi qui pourras surfer dessus. » nous dit Hélène dans son livre, se remémorant les enseignements de son propre père.
Ne pas résister, se laisser porter par la vague semble être une des premières clés pour surmonter un burn out. Mais pas que…
Hélène confie dans ses témoignages qu’il lui a fallu du courage, un courage ordinaire pour sortir progressivement de cet épuisement. Il fallait oser, par exemple et entre autres, oser ouvrir la porte au facteur, à 11h du matin, en pyjama, oser ce montrer telle qu’elle est vraiment !
Il lui a fallu 2 ans pour surmonter le burn out.
Maris, familles, enfants ont besoin de nous, ils ont besoin de notre présence et que l’on aille bien, ils n’ont pas besoin que l’on soit parfaite. C’est une des premières leçon à connaître pour se laisser tranquille, se laisser être une bonne mère imparfaite mais heureuse de l’être.
Hèlene Bonhomme lance l’idée de l’imperfection heureuse et nous rappelle qu’être fabuleuse, ça se décide.
Se faire aider après un burn out parental
Très concrètement Hélène a d’abord accepté de se faire aider : elle a placé quelques heures par semaine ses jumeaux à la crèche, malgré la culpabilité. Puis elle a eu envie de se retrouver, de s’aimer à nouveau, elle a lu beaucoup et s’est intéressé au développement personnel.
Enfin, au gré d’événements extérieur, elle a entamé une psychothérapie qui s’est avérée très bénéfique dans sa vie de mère.
Au sortir de cette période, elle publie un article de blog, le premier d’une longue série, qui touchera au coeur des milliers de mères : elle libère la parole et dit enfin à toutes les femmes « moi aussi, j’ai vécu ça » . Elle fonde alors le blog Fabuleuses au foyer et accompagne, comme elle aurait aimé l’être, forte de son expérience, toutes les femmes qui recherchent compréhension, aide, soutien, et une dose de soleil dans leur vie chamboulée de mère.