Stéphanie et Pauline témoignent de leur vécu face à une pathologie méconnue de la grossesse, le Placenta Accréta. Suite à leur histoire, elles ont fondé l'association Placenta Accréta France afin d'améliorer la sensibilisation et l'accès au diagnostic des femmes enceintes pour un meilleure prise en charge.
Témoignages de deux mamans extraordinaires après un placenta accréta
"Je m'appelle Stéphanie, j'ai 40 ans, Lyonnaise d'origine, je suis partie pour mes études puis me suis expatriée 3 ans a Londres ou j'ai rencontré mon mari. Ensemble nous sommes partis vivre 8 ans en Asie, à Singapour, une tranche de vie inoubliable, faite de rencontres et de voyages extraordinaires. Nous avons vécu 3 ans à Lyon avant de repartir vivre en Afrique de l'Ouest. Vous l'aurez compris, les voyages et nouvelles expériences sont mes moteurs ! "
" Je suis Pauline, 35 ans, en couple avec Pierre depuis 15 ans et maitresse de conférences à l'Université Paris Cite. Nous sommes parents de Louise 5 ans et Margaux 2 ans et demi. Nous avons longtemps vécu à l'étranger et nous voilà de retour en région parisienne. Lorsque je ne suis pas avec mes filles, je suis soit face à mes étudiant.te.s, soit dans mon laboratoire de recherche, soit en train de courir, escalader ou faire du yoga.
Depuis quelques mois, je suis co-présidente de l'association Placenta Accreta France, avec Stéphanie."
Quel a été votre parcours vers la parentalité ?
Stephanie :
"Pour mes deux filles j’ai eu la chance de tomber enceinte tout de suite, et de mener mes deux grossesses à terme sans trop de symptômes désagréables (ou presque !). Pour ma première grossesse j’ai eu un placenta praevia, c'est- à- dire recouvrant le col de l'utérus. Une césarienne a été programmée et tout s’est bien passé… je n’ai été inquiétée à aucun moment.
Ma deuxième grossesse et ses suites furent beaucoup plus chaotiques, un deuxième praevia, qui à cause de mon utérus cicatriciel évolua en placenta percreta, la forme la plus sévère du placenta accreta.
A l'échographie du troisième trimestre, le gynécologue a en effet constaté que mon placenta avait envahi ma paroi utérine, et s'était accroché à ma vessie… Après une césarienne extrêmement éprouvante cette fois, faite en urgence, les médecins ont tenté un traitement conservateur pour sauver mon utérus,... 3 mois de douleurs plus tard, le placenta s'est infecté et j'ai dû à nouveau être opéré en urgence pour une hystérectomie et reconstruction de la vessie.
Les premiers mois de ma filles furent terribles pour toute notre famille, mais aujourd'hui nous sommes en bonne santé. Un an plus tard, et suite à ma rencontre avec Pauline, nous avons décidé de créer Placenta Accreta France. "
Pauline :
"Pour mes deux grossesses j’ai commencé par être très malade avec des nausées et vomissements qui m'empêchaient de tenir debout. Cela n’augurait rien de bon…
Pour la première, j’ai du subir une intervention à 16 semaines pour poser un cerclage car mon col raccourcissait. Malgré les nausées constantes, la grossesse a pu être menée à terme et j’ai perdu les eaux à 39 semaines. Après 56h de travail sans péridurale (j'étais en Angleterre et la tendance est de ne pas médicaliser les accouchements), mon col n'était pas encore complètement dilaté, le coeur du bébé décèlerait à chaque contraction et j'étais très affaiblie, j’ai donc subit une césarienne en urgence. Ma bébé a été extraite rapidement et les complications ont commencé pour moi : le placenta restait accroché. J’ai perdu 2L de sang et malgré les difficultés, l'équipe médicale a pu extraire le placenta. En sortant du bloc, ma docteur m’informe que j’ai eu de la chance car mon placenta était trop adhérant (placenta focalement accreta) et qu’il faudra que je sois vigilante lors de ma prochaine grossesse. Évidement après 56h de travail et une césarienne compliquée, tout cela me passe au dessus, je suis juste ultra heureuse de tenir mon bébé et d'être là, je ne réalise pas ce qu’il vient de se passer et j’oublie cette histoire de placenta adhérent.
Pour ma deuxième grossesse, en plus des vomissements, je saigne tout le premier trimestre et mon placenta est previa (bas inséré et recouvrant le col). C’est à ce moment-là que les histoires de placenta adhérent me reviennent et j’en informe mon gynécologue qui ne croit pas que j’ai pu avoir un placenta accreta lors de ma première grossesse. Je présente pourtant tous les facteurs de risques pour un placenta accreta. Je décide donc de faire suivre cette grossesse dans un CHU et le diagnostic tombe autour de la 22ème semaine, mon placenta est bien accreta avec une atteinte probable de la vessie. Je devrai donc accoucher par césarienne au cours de la 34 ème semaine, avec une très probable hystérectomie, et des poches de sang seraient prêtent car une hémorragie était à craindre. Je passe la fin de ma grossesse dans un état second, sans pouvoir me projeter au-delà du jour de l’accouchement prévu. Le CHU me propose un accompagnement psychologique que j’accepte mais je me sens tout de meme terriblement isolée. Les semaines qui suivirent mon accouchement furent éprouvantes physiquement mais finalement c’est le rétablissement émotionnel qui fut plus compliqué à cause d’un stress post traumatique. Cela fait maintenant 2 ans et demi et j’ai retrouvé toute mon énergie, je dédie une partie de mon temps libre pour Placenta Accreta France que nous avons créé avec Stephanie il y a quelques mois. "
Le conseil qui vous a été le plus utile :
Stephanie :
"Il faut voyager tant que le bébé est petit ! il est tellement plus facile de voyager avec un bebe de 6 mois que 1 ans et plus..."
Pauline :
"Ne rien acheter avant l'arrivée du bébé et qu'on verra au fil de l'eau ce dont nous aurions réellement besoin. C'est vrai qu'au final nous n'avons pas eu besoin d'acheter grand-chose."
Votre jolie anecdote avec le corps médical :
Stephanie :
"La césarienne qui a été faite pour ma 2ème fille fut longue et éprouvante. Mon mari n'a pas été autorisé à y assister et je n'ai pas du tout pu voir mon bebe. Une fois terminé on devait tout de suite m'emmener dans un autre service pour une autre intervention qui durera 4 heures. En sortant de la césarienne, quelqu'un a posé Alba sur moi, elle était minuscule, et j'ai pu lui faire un rapide câlin, quelques secondes avant de partir. Au moment de franchir la porte une infirmière m'a posé sur la poitrine une photo d'Alba qu'elle avait pris le temps je ne sais comment de prendre et d'imprimer pour moi. Je n'ai pas su qui elle était et n'ai jamais eu l'occasion de la remercier mais ce geste m'a énormément touché."
Pauline :
"Après ma césarienne hystérectomie pour ma deuxième bébé nous avons été séparées pendant plus de 24h. Malgré les douleurs et la fatigue, je souhaitais allaiter ma bébé. Alors que j'étais encore assommée par l'anesthésie générale et que je ne pouvais pas bouger mes membres, une sage-femme est venue en salle de reveil avec ma bebe et un tire lait pour enclencher le processus de lactation. Le lait trop chargé en anesthésiants et médicaments en tout genre a ensuite été jeté mais suite à cela et à l'aide des sages femmes et puéricultrices, j'ai pu allaiter ma bebe exclusivement pendant 1 an."
Ce que vous auriez aimé savoir et qu'on ne vous avait pas dit :
Stephanie :
"J'aurais aimé savoir qu'un 2ème placenta praevia présentait d'énormes risques de développer un Placenta Accreta... Malheureusement, ni ma sage-femme si mon échographiste ne connaissait les facteurs de risque..."
Pauline :
"Un accouchement par césarienne ne vous empêchera pas de développer une relation forte avec votre bebe, qu'une césarienne n'est pas un échec et qu'elle sauve la vie des mamans et des bébés. Un stress post traumatique peut survenir bien après l'évènement (trouble de la mémoire, troubles du sommeil/insomnie, hypervigilance, évitement de lieu et situations)."
Votre produit fétiche, pour vous ou bébé :
Stephanie :
"On a essayé d'être le plus minimaliste possible dans nos équipement, mais j'avoue avoir craqué pour une couverture d'emmaillotage à scratch qui nous a sauvé pas mal de nuits !"
Pauline :
"L'écharpe de portage. Prêtée par ma sœur qui l'avait eu pour son premier bebe, elle m'a beaucoup servi pour mes 2 bebe et servira encore a ma sœur! Le sentiment de liberté tout en restant au plus proche de son bebe est parfait. j'allais partout avec:) Bémol, il faudrait trouver un système d'accroche qui n'appuie pas sur les cicatrices de césarienne!"